X
Rechercher

Guide ultime des théières kyusu traditionnelles japonaises (types, histoire, materiaux, origines…)

En bref

  • Les théières japonaises se nomment kyusu.
  • Il y a quatre types de kyusu :
    • Yokode no kyusu
    • Ushirode no kyusu
    • Uwade no kyusu (Dobin)
    • Houhin (宝瓶) et shiboridashi
  • Les théières peuvent être faites en argile, fer ou porcelaine.
  • Elles prirent leur essor au Japon lors de l’introduction du sencha en 1738.
  • Pour bien l’entretenir, lavez doucement votre théière à l’eau tiède sans savon, avant de la faire sécher et de la ranger près de votre thé.

Les théières traditionnelles japonaises, connues sous le nom de kyusu, sont des théières faites d’argile, de porcelaine, ou de fer.

Reconnaissables à leurs longues poignées uniques (mais pas que !), elles sont utilisées depuis des siècles au Japon. Voici tout ce que vous devez savoir à leur sujet.

111
Kyusu uwade (gauche) et kyusu yokode (droite). Source.

Que sont les kyusus ?

Kyusu signifie théière en japonais et désigne toutes les théières en général, pas uniquement celles traditionnelles.

La théière japonaise typique à poignée unique se nomme yokode no kyusu. Bien que celles-ci soient d’origine chinoise, elles sont devenues rares en Chine et courantes au Japon.

Quelle est l’histoire des kyusu ?

Les théières japonaises sont originaires de Chine et auraient été introduites au Japon durant la dynastie Tang (618 – 907) par les moines Kūkai et Saichō, envoyés comme diplomates (Kentoshi). Leurs ancêtres sont le kifus, un pot fabriqué pour chauffer de l’alcool, et le kibusho, un pot pour chauffer de l’eau.

Elles n’eurent cependant que peu de succès. En effet, le thé de l’époque était un matcha vendu en poudre et dissous directement dans un bol où il pouvait être fouetté à souhait, rendant l’utilisation d’une théière inutile.

Elles ne devinrent monnaie courante qu’après l’introduction progressive du sencha en 1738, devant leur popularisation à Baisao, notamment.

Baisao était un moine vendeur de thé à Kyoto qui commença son « activité » en 1735. Il était l’un des rares à vendre du thé infusé de feuilles, méthode chinoise qu’il avait apprise dans ses jeunes années au monastère et qu’il préférait à la dissolution de poudre.

Après l’invention du sencha, les potiers japonais prirent pour modèle les théières du Yixing chinois et les adaptèrent à leur propre goût et usage, créant quatre modèles. Les théières furent également influencées par la cérémonie du thé.

Types de théières japonaises

Il y a quatre types de théières japonaises.

Yokode no kyusu (横手の急須)

image 3
Yokode no kyusu Source.

Le yokode no kyusu est la théière classique japonaise reconnaissable à sa poignée latérale. Son nom signifie littéralement « théière à poignée latérale ». Elle permet de verser le thé et de la contrôler facilement et sans se brûler, ce qui la rend idéale pour servir des invités.

La théière est faite pour l’infusion de sencha (ou autre thé vert en feuille) et contient un filtre dans ce but.

Ushirode no kyusu (後手の急須)

image 2
Théière de Tokoname en argile rouge. Source.

L’ushirode kyusu est reconnaissable à sa poignée arrière ressemblant aux théières occidentales.

Bien qu’elle soit moins courante au Japon, elle est toujours utilisée.

Son nom signifie « théière à poignée arrière ».

Uwade no kyusu, aussi appelée Dobin (上手の急須, 土瓶)

L’uwade no kyusu (« théière à poignée supérieure ») est caractérisée par sa poignée disposée sur le dessus de la théière. Elles sont utilisées pour servir du thé aux groupes larges car plus grandes.

Houhin (宝瓶) et shiboridashi

Les théières houhin ont été conçues pour les thés verts de haute valeur tels que le gyokuro ou le shincha. Parce que les thés verts précieux sont infusés dans de l’eau à température moyenne (60 – 70°C), elles n’ont aucune poignée et se manipulent comme un bol.

Son nom signifie « vaisseaux à trésors ». Ce design offre un meilleur contrôle de la température d’infusion, essentiel pour les thés sensibles.

Les théières shiboridashi sont des variantes de houhin, plus petites, conçues pour une personne et non plusieurs individus. Leur couvercle sert souvent de filtre, permettant un contrôle précis du temps et de la température d’infusion.

Matériaux, artisanat, tailles, couleurs, et origines

Argile

Les théières japonaises traditionnelles sont fabriquées en argile de différentes sortes, couleurs, origines, et compositions. Les plus connues viennent de Tokoname et Banko, mais bien d’autres villes et régions en produisent.

image 1
Ligne tectonique médiane du Japon en rouge et ligne tectonique Itoigawa-Shizuoka en bleu à l’ouest. Source.

La plupart sont situées le long de la ligne tectonique médiane du Japon (JMTL) et de la ligne tectonique Itoigawa-Shizuoka (ISTL) car l’activité volcanique permet d’avoir une argile riche en minéraux.

Les théières faits main sont uniques. Une fois la théière ou le couvercle cassé, il est impossible d’en trouver un(e) autre correspondant.

Nous vous recommandons donc une extrême prudence lorsque vous manipulez votre théière.

Voici les lieux de fabrication des théières en argile les plus réputées.

Tokoname

image 2
Théière de Tokoname en argile rouge. Source.

Tokoname est un village japonais connu pour ses théières en argile rouge (Shudei).

Celles-ci sont riches en fer ce qui leur permet d’adoucir l’astringence des thés les plus amers.

Elles sont également non émaillées la plupart du temps et peu poreuses ce qui leur donne une influence certaine mais légère sur le goût du thé.

Certaines théières sont également fabriquées en argile noire (Kokudei) dont la couleur trouve sa source dans le processus d’oxydation qu’il subit.

D’autres théières sont faites de mélanges d’argile, ou d’un mélange d’argile avec d’autres minéraux leur donnant une couleur mauve.

Banko

Les théières Banko sont fabriquées à partir d’une argile brune/mauve, tout aussi riche en fer que les théières de Tokoname, mais plus poreuse. Cela signifie qu’elles aspirent l’astringence du thé, les rendant idéales pour le bancha, par exemple.

L’argile de Banko est également connue pour sa résistance à la chaleur. Bien que tous les types de théières y soient fabriqués, les yokode no kyusu sont les plus connues.

Shigaraki

Les théières de Shigaraki sont fabriquées à partir d’un mélange d’argile terreux au look naturel et tacheté, et de terres contenant des morceaux de bois carbonisés.

Les tons varient du beige/marron au rouge rappelant le concept du wabi-sabi. Lorsqu’artisanales, les théières de type Uwade ont un manche en bois.

Bizen

Les théières de Bizen sont des théières non émaillées et uniques de style, causé par le mélange de l’argile et de la suie du four dans lequel elles ont été modelées. Bien que Bizen ne soit pas nécessairement connu pour ses théières, les quelques-unes qui y sont fabriquées le sont le plus souvent dans le style Hohin. La porosité des théières de Bizen est minimale.

Seto

Seto est un des plus anciens centres industriels de production de céramique au Japon (son origine date de plus de 1000 ans). Les théières de Seto sont faites de plusieurs styles différents, rendant la région célèbre pour sa diversité et son innovation constante. Les couleurs sont aussi variées que le blanc, bleu, vert, ou marron. Elles peuvent être émaillées ou non.

Mashiko

Les théières Mashiko sont rares et chères car connues pour être fabriquées à la main, avec une emphase sur le design simple et pratique inspiré par l’utilisation de la théière. Émaillées et de haute qualité, elles sont disponibles en différentes tailles. Elles sont également objets de collection.

Hagi

Les théières Hagi, originaires de la ville du même nom, sont fabriquées à partir d’argile beige et vernies d’un vernis bien spécifique leur permettant de s’améliorer avec l’âge. Le style le plus représenté est le Houhin. Lorsque non émaillée, l’argile y est légèrement poreuse permettant à la théière d’avoir un goût subtil.

Mino

Les théières de Mino, tirant leur nom de l’ancienne appellation de la province où elles sont produites, prirent de l’importance à la fin du XVIe siècle avec l’essor de la cérémonie du thé amenée à son sommet grâce à Sen no Rikyū.

On en trouve de plusieurs styles tels que Shino, Setoguro, Ki-Seto et Oribe. La plupart des théières de Mino sont des yokode no kyusu.

Faut-il choisir une théière émaillée ?

Il y a deux choses à savoir pour répondre à cette question.

Primo, l’émail est une couche neutre protégeant le thé et l’argile l’un de l’autre. Les théières émaillées n’influenceront donc pas le goût du thé.

Segundo, il existe un échange constant de saveurs entre les théières non-émaillées et le thé. Il convient donc de réserver une théière par type de thé.

Si votre choix de thé se porte toujours sur la même sorte, ou si vous désirez réserver une théière pour chaque type de thé (il n’y en a que six, après tout), rien ne vous empêche de vous lancer dans l’aventure des théières non émaillées !

Dans les autres cas, nous vous conseillons une théière émaillée.

Porcelaine

Bien que plus rares, les Japonais utilisent (et produisent) également des théières en porcelaine, pratiques pour les thés dont la température doit être contrôlée. En effet, la porcelaine reste le meilleur matériaux pour l’isolation de la chaleur.

Les plus connues sont les théières Arita, originaires de la ville du même nom et célèbres pour leur qualité exceptionnelle, faisant d’elles des objets de collection également.

Fabriquées à la main à partir d’argile de porcelaine, elles sont souvent décorées de motifs peints ou appliqués.

Métal

Les théières japonaises traditionnelles en métal sont en fonte; il faut en distinguer deux types.

  • La tetsubin
  • La tetsukyūsu

La tetsubin n’est pas une théière à proprement parler car sa fonction n’est pas d’infuser le thé, mais de faire chauffer l’eau.

Elle s’apparente donc plus à un boiler qu’à une théière, au contraire de la tetsukyūsu qui est émaillée à l’intérieur et possède un filtre pour le thé. Les occidentaux ne les différencient pas et les appellent souvent toutes deux « tetsubin ».

Les théières en métal les plus connues viennent de Kyoto. Avec le temps, les Japonais les ont modifiées pour en faire un appareil deux-en-un de bouilloire et de théière, les rendant particulièrement pratiques.

De quelle taille ma théière doit-elle être ?

Cela dépend de votre usage. Si vous préparez du thé pour trois personnes ou plus régulièrement, nous vous conseillons des théières de plus grandes tailles.

Comment utiliser une théière japonaise ?

  • Rincez : Rincez votre théière à l’eau chaude pour éviter les poussières et pour la réchauffer.
  • Placez-y le thé : Référez-vous au thé que vous avez acheté pour le volume adéquat de thé à utiliser.
  • Versez l’eau à température adéquate : Les thés verts sont infusés (ou dissous, dans le cas du matcha) à des températures avoisinant les 60-80°C tandis que les thés noirs et oolong nécessitent 90-100°C.
  • Laissez infuser : Consultez votre paquet de thé pour le temps d’infusion idéal. Les thés verts sont traditionnellement infusés moins longtemps que les thés noirs ou oolong.
  • Servez

Comment entretenir une kyusu japonaise ?

Rincez votre théière en argile à l’eau tiède et évitez d’utiliser du savon.

Ne la mettez absolument jamais dans le lave-vaisselle.

Laissez la théière sécher à l’air libre puis rangez-la, comme le thé, dans un endroit frais, sec et à l’abri de la lumière. Évitez de la placer à côté d’épices ou d’aliments à fortes odeurs car le principe de l’argile est qu’elle aspire les saveurs. Personne ne veut un goût de curcuma dans son sencha !

Faites de même pour les théières en fonte et en porcelaine (celles-ci peuvent être nettoyées avec une brosse douce).

Que sont les Six Anciens Fours (Rokkoyō) ?

Les Six Anciens Fours (Rokkoyō) sont un concept créé par Koyama Fujio pour désigner des fours produisant des poteries en céramique depuis au moins le Moyen-Âge. Ceux-ci sont :

  • Les fours de Bizen
  • Les fours d’Echizen
  • Les fours de Seto
  • Les fours de Shigaraki
  • Les fours de Tamba
  • Les fours de Tokoname

À noter que bien que les théières japonaises soient populaires, les potiers produisent aussi d’autres ustensiles.

Conclusion

Les théières japonaises sont faites d’argile, de fonte, et de porcelaine. Trouvant leurs origines en Chine, elles ont évolué au Japon et sont devenues monnaie courante après l’introduction du sencha au 18e siècle.

Les théières non émaillées interagissent constamment avec le thé qui y est versé, tantôt prenant, tantôt donnant des saveurs. Il est conseillé de n’infuser que la même sorte de thé dans ces théières.

Les théières émaillées, en porcelaine, et en fonte sont neutres.

Les théières japonaises méritent plus qu’un article pour être intégralement appréciées, mais vous voici déjà avec de solides connaissances vous permettant de naviguer sans problème ce monde si particulier !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Panier
Retour en haut
Rechercher